Tandis que le monde ferme à nouveau ses frontières, l’ensemble des pays du Vieux-Continent fait face à une cinquième vague. Alors que le variant Omicron se propage, l’OMS craint la combinaison « toxique » de faibles taux de vaccination et de dépistage du Covid-19. Afin de sortir de la pandémie, une vision globale fondée sur la coopération constitue l’unique solution. Mais au-delà du Covid-19, réorienter les investissements dédiés à la santé en s’appuyant sur une vision à long-terme est l’objectif principal que les décideurs devront mettre en place.
Antonio Guterres, Secrétaire Général de l’ONU a fustigé l’attitude des pays développés, ayant fermé leurs frontières face au nouveau variant. Il dénonce le « scandale » d’une condamnation de l’Afrique pour n’être pas assez vaccinée. Et c’est justement depuis ce continent qu’est apparu le variant Omicron. Cette région du monde est en effet la moins vaccinée : dans près de la moitié des pays, le pourcentage de personnes ayant reçu un schéma vaccinal complet reste inférieur à 2 %. Comme rappelé par le Directeur Général de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) « La fin de la pandémie n’est pas une question de chance, c’est une question de choix ». Une approche fondée sur la solidarité est plus que jamais essentielle, afin de parvenir à une couverture vaccinale suffisante tout en poursuivant le dépistage, évitant ainsi que les variants ne se reproduisent. La solidarité passe aussi par un accès équitable à la vaccination, dans tous les pays. Or les résultats des dispositifs mis en place pour y parvenir, tel que Covax, sont très mitigés : les inégalités demeurent telles qu’en septembre 2021, la Suède avait reçu 9 fois plus de vaccins de Pfizer que l’ensemble des pays à bas revenus réunis. Au-delà de nos interdépendances, les États devront également réinvestir dans leurs systèmes de santé afin d’être résilient face aux épidémies.
Au sein de l’Institut de l’Économie Positive, nous partageons la vision que seule une profonde refonte des services de santé servira à la fois nos intérêts et ceux des générations à venir. La santé représente en effet l’un des leviers clés afin de réorienter notre modèle vers une meilleure prise en compte du long-terme. La consultation citoyenne que nous avons réalisé en mai dernier[1] rapporte que cette dernière arrive en tête des préoccupations dans l’ensemble des pays du G20. Pour gérer l’après-crise, 67% des interrogés se disent même prêts à des sacrifices de court-terme si ceux-ci conduisent à la mise en place des solutions à long-terme, confirmant une prise de conscience collective. Nous plaidons plus précisément en faveur de l’adoption d’une politique de santé unifiée, selon le concept « One Health » (« une seule santé »), reconnaissant l’interdépendance entre humains, animaux et environnement.
La Commission paneuropéenne de la santé et du développement durable tire des conclusions similaires à notre Manuel pour une sortie positive de la crise[2] : investissements massifs dans l’innovation et dans la prévention, meilleure surveillance et collecte des données, gouvernance globale organisée et développement des partenariats entre les secteurs public et privé, où les risques et les bénéfices seraient partagés. Le One Health High-Level Expert Pane créé suite au Forum de la Paix de 2020 pourrait constituer un progrès majeur afin de faire appliquer les objectifs cités, mais les moyens alloués restent largement insuffisants.
La période en cours est cruciale pour les gouvernements, à la fois concernant la gestion de la fin de la pandémie mais surtout pour prévenir les suivantes. Dans le domaine de la santé, comme dans celui de l’environnement, les intérêts dépassent les frontières. Les avancées existent, comme le lancement d’un processus de négociation en vue d’aboutir à un accord international pour mieux prévenir et combattre une prochaine pandémie par l’ensemble des pays membres de l’OMS. Nous suivons avec attention les évolutions de la nouvelle vague, mettant plus que jamais en question le choix de la solidarité.
Brune Tavernier, Chargée Plaidoyer
[1] Paru en novembre 2020 chez Fayard
[2] Disponible à l’adresse suivante : https://www.institut-economiepositive.com/blog/consultation-citoyenne-changements-apres-la-crise-de-la-covid-19/